« J’ai eu mon premier appareil photo à 18 ans. Un Zénith  russe. J’étais fascinée par  la photo noir et blanc, surtout parce que je pouvais réaliser le développement moi-même et donc contrôler l’image finale. J’aime être autonome et ne pas dépendre du travail des autres lorsqu’il s’agit d’une de mes productions. Je travaillais avec un ami qui avait monté un petit studio chez lui.

Je suis partie en Europe en voyage de fin d’études universitaires, chargée d’une trentaine de pellicules que j’avais préparées moi-même. Je ne suis jamais revenu de ce voyage qui était censé durer trois mois. Je me suis installée en France. Lors d’un de mes déplacements au début de mon séjour, le sac qui contenait presque toutes mes pellicules me fut volé. Je n’ai donc jamais vu ce que j’avais photographié. 

En France, pendant quelques années je n’ai pas eu le loisir de faire de la photo, car c’était trop cher pour mes faibles moyens. Mais dès que j’ai pu  recommencer,  ce fut un nouveau départ, cette fois avec la couleur. Mon deuxième appareil  fut un Pentax dont j’ai oublié le type, puis un Nikon AF-601. Mais, il y avait toujours au fond de moi un rien de frustration, du fait de ne pas pouvoir agir davantage sur mes images.  Souvent les développements me décevaient. 

A Istanbul, où je vis actuellement, j’ai rencontré un photographe colombien qui travaillait avec la (mal famée) photo numérique et connaître son travail m’a fait découvrir les vastes possibilités de celle-ci. J’ai vu là une manière de faire de la photo en toute indépendance. 

Je me suis donc acheté un Nikon D70 et depuis je peux dire que je réalise enfin  le rêve profond qui m’habitait : celui de « faire de la photo ». Car avec le logiciel Photoshop c’est enfin moi qui manipule le cadrage, les contrastes et les couleurs de mes prises de vue. Et lorsque la photo est mauvaise je ne peux m’en prendre qu’à moi-même !
Pourquoi la photo ? Parce que la beauté du monde m’émeut et que je veux en garder une trace pour me souvenir et pour la partager avec ceux qui n’ont pas l’opportunité de la contempler. »